Cette analyse est fondée sur les travaux du "Laboratoire européen d'anticipation économique" et ceux de Gérard Dussouy, professeur de géopolitique à Bordeaux IV.
N'en déplaise à Alain Minc, le bon apôtre de la mondialisation heureuse, la mondialisation c'est la guerre. Ses enjeux sont de nature commerciale, financière et monétaire, sans exclure le facteur militaire sous-jacent. L'ennemi, de nature impérialiste et hégémonique, que personne n'ose encore désigner, est le pouvoir anonyme des opérateurs financiers de Wall Street et de la City. Pouvoir anonyme, et non constitué en tant que tel, auquel participent les gosses bien formés de nos grandes écoles qui vont se mettre à son service pour jouer aux "traders" usuriers.
Et surtout n'allez pas voir là une nouvelle version de la théorie du complot. Les financiers ne veulent pas le pouvoir mondial, ils n'aspirent qu'à jouer avec l'argent, à s'amuser comme des petits fous ( ou plutôt les grands fous qu'ils sont)et rien d'autre. Pire, ils ne contrôlent pas leur pouvoir,ils sont dépassés par les jeux mathématiques des gosses qui sont derrière les écrans, ces gosses qui s'amusent, font fortune à 22 ans ou font ......sauter la banque parfois.
Face à ce pouvoir anonyme, il n'y a rien, ou presque. Aucun Etat n'est en mesure aujourd'hui de conduire une politique économique contraire à leurs intérêts. A Londres ou à New York,le pouvoir politique n'est que la prolongation de leur pouvoir de fait, mais les gouvernements anglo-saxons auraient tort de croire qu'ils seront épargnés, la spéculation n'a pas de patrie et elle va de maillon faible en maillon faible en quête de profits. Après les dettes grecque et européennes la dette des pays anglo saxons sera leur prochaine victime. Mais pour l'instant c'est l'euro et la zone euro qui sont attaqués.
La spéculation mondialisée profite en effet de l'insuffisance de l'intégration européenne et des disparités économiques qui la caractérisent,ainsi que de la gestion calamiteuse de nombreux gouvernements européens, Grèce en tête. La spéculation mise sur l'éclatement de la zone euro qui serait source de juteux profits payés par les contribuables, et il n'est pas faux de dire que la situation de la zone euro est alarmante.
Alarmante mais pas désespérée, grâce précisément à la prise de conscience née de la crise. La zone euro est devenue un espace de recherches en solutions et de refus de la dictature des marchés. Parmi les solutions qui s'esquissent, mentionnons la monétisation des dettes des pays les plus en difficulté ( ce qui permet de réduire la pression des marchés sur ces Etats), le renforcement du FESF, et la restructuration de la dette grecque sous la surveillance d'experts européens préfigurant une gouvernance économique européeenne.
La situation est donc moins désespérée que les grands médias anglo saxons se plaisent à le dire et à l'écrire; ce n'est pas nouveau car jamais Wall Street ou la City n'ont admis la création de cet euro dont la vocation est de concurrencer tôt ou tard le dollar avec l'aide des pays du BRIC (Brésil,Russie, Inde et Chine) qui sont les alliés naturels d'une Europe contrainte de larguer les amarres atlantistes pour survivre et exister enfin par elle-même.
Techniquement la zone euro a les moyens d'affronter la crise qu'elle connaît. Tout va dépendre maintenant de la clairvoyance, de la sérénité et surtout de la volonté des dirigeants des Etats européens.La paille européenne ne saurait en effet faire oublier la poutre enfoncée dans les finances anglo saxonnes. Ne perdons pas de vue en effet la situation financière apocalyptique des Etats-Unis, ni celle de la Grande Bretagne (le pays le plus endetté du monde si l'on cumule dette privée et dette publique). La mèche de la bombe spéculative est allumée pour ces pays encore plus que pour la dette européenne,mais seule à ce jour la zone euro est attaquée; ce qui a eu l'heureux effet de faire enfin prendre conscience aux Européens qu'il était urgent d'éteindre la mèche. En soutenant Angela Merkel dans son engagement envers le FESF, le Bundestag vient d'envoyer un signal fort, tout comme Nicolas Sarkozy qui parle d'obligation morale de solidarité européenne.
Certes les marchés n'en ont cure car les financiers jouent sur la lenteur de la réactivité des Etats de la zone euro. Nous assistons donc à une course de vitesse entre les financiers, ligués contre la zone euro, qui entretiennent la mèche allumée de la spéculation,et la volonté d'éteindre la mèche par le contrôle et la régulation manifestée par Angela Merkel, Nicolas Sarkozy et la BCE. Un timide début et rien n'est joué dans le champ clos de la guerre financière mondialisée. Le vainqueur sera, comme à OK corral celui qui dégainera le premier.